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Article de presse du journal "Le Temps" après le décès de L. Zamenhof :

Le Temps, 19 Avril 1917 :
"…C'était un homme doux et de faible santé, qui n'a pu résister aux coups que la guerre a portés à son œuvre…"
"…Beaucoup de ceux qui souhaitaient d'établir la concorde en ce monde voyaient en cette humble grammaire le talisman qui contraindrait les humains à s'aimer les uns les autres…"
"…Il ne vécut plus qu'avec désespoir, et la mort de cet apôtre généreux a eu quelque chose d'un renoncement."


Le Temps, Jeudi 19 Avril 1917 :

 

Le Temps, 19 Avril 1917

La mort d'un apôtre


L'inventeur de l'esperanto n'est plus. Il s'appelait Zamenhof, il était docteur en médecine et était né en Pologne russe, à Bielostok, il y a soixante-trois ans. On dit qu'il est mort de chagrin et de misère. C'était un homme doux et de faible santé, qui n'a pu résister aux coups que la guerre aportés à son œuvre. L'idée lui était venue d'unir les hommes par le langage ; et voilà qu'une nouvelle leçon d'Esope lui fut infligée par les Allemands, qui firent servir l'écriture et l'éloquence à tromper, à corrompre et à bouleverser les nations.

Après vingt ans d'un labeur têtu, il réussissait à tenir, à Boulogne-sur-Mer, en 1905, un congrès espérantiste. Ses disciples étaient déjà nombreux. L'esperanto a un vocabulaire honnête et simple qui s'acquiert, paraît-il, aisément. Et puis l'esperanto passait aussi pour être l'instrument béni de la paix. Beaucoup de ceux qui souhaitaient d'établir la concorde en ce monde voyaient en cette humble grammaire le talisman qui contraindrait les humains à s'aimer les uns les autres. Si l'amour ne régnait pas sur terre, l'esperanto du moins y progressait. En 1914, le dixième congrès allait s'ouvrir à Paris. Le docteur Zamenhof était venu de Varsovie et l'assemblée s'apprêtait à célébrer sa gloire pacificatrice et philologique quand les Allemands nous attaquèrent… Les espérantistes furent comme fourmis dans la fourmilière démolie par le pied du passant. Ils fuyaient de toutes parts, mais sans savoir où, car on les arrêtait aux frontières. Le docteur Zamenhof fut lui-même empêché de retourner dans son pays en passant par l'Allemagne. Il mit un long temps à regagner Varsovie. Quand il retrouva son foyer, il pleura sur son œuvre, sur les hommes et sur lui-même. Il ne vécut plus qu'avec désespoir, et la mort de cet apôtre généreux a eu quelque chose d'un renoncement. — J. L.



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